Bon ; chères lectrices et chers lecteurs, ce n’est pas habituel, pour moi, de vous parlez de ma vie privée depuis la création de ce blog en 2005 mais, vu notre situation actuelle de pandémie, je m’en vais vous raconter les journées de mon épouse, aujourd’hui infirmière libérale après dix ans passée dans l’équipe de nuit d’un service hospitalier de réanimation.

Réalité de sa journée de visite ; problèmes intrinsèques en amont et en aval de sa patientèle ; gestion de la misère sociale et respect des ordonnances médicales - certaines fois rédigées en dépit du bon sens - qui déterminent ses soins ; allons donc dans le monde merveilleux des soins à domicile.

C’est quoi un infirmier libéral ?

La définition officielle ; «Une infirmière libérale ou IDEL est une infirmière diplômée ayant exercé à l'hôpital et qui s'installe en libéral dans un cabinet de ville. ... L'infirmière libérale travaille majoritairement à domicile mais peut recevoir des patients dans son cabinet»

La définition réelle : L’infirmière libérale est avant tout une infirmière diplômée d’État, qui a déjà pratiqué, pendant au moins 2 ans, en hôpital ou établissement de soins. Elle est donc capable d’effectuer les mêmes soins qu’une infirmière hospitalière et psy.

C’est cependant dans la manière dont les soins sont attribués que la différence entre l’hôpital et le libéral s’effectue.

Selon le Code de Santé Publique, l’IDEL effectue des soins relevant de son rôle propre, mais doit aussi pouvoir poser un diagnostic infirmier, ou encore participer au dépistage, à la prévention, et à l’éducation à la Santé.

Les soins peuvent être dispensés sur prescription médicale ou en présence d’un médecin prescripteur. Le rôle de l’infirmière libérale dans les soins à domicile est donc pluridisciplinaire de façon à prendre en charge le patient dans sa globalité. Par ailleurs, il est important de pointer le rôle de pilier de l’IDEL dans la coordination des soins médicaux, et notamment avec les autres professionnels de santé.

Les journées d’un infirmier libéral

Réveil de mon épouse ; 6h00. Un thé au lait à l’écoute de France Inter et préparation des cachets du matin pour notre voisin d’en face, premier patient de sa tournée et, si je puis dire, le plus simple géographiquement à défaut d’être le plus simple au niveau de sa gestion quotidienne - ce patient l’appelant «maman» et ayant fait un certain nombre d‘allez et retour en service psy ... Pas méchant, plutôt introverti et à qui nous donnons, de temps en temps des cloppes, des boites de thon, quelques conseils et, surtout, beaucoup d’attention.

Départ de la tournée par les patients récurrents diabétiques, tout en jonglant avec les prises de sang ponctuelles pour les patients de laboratoires d’analyses ne pouvant - ou ne voulant - se déplacer au laboratoire. 

Puis vient le nursing ;  les pansements suite à un accident ; l’écoute des plus anciens ; le café dégueulasse en évitant le chien qui se frotte à sa cuisse ; le voisin qui gueule parce que mon épouse s’est garée devant chez lui ; le patient qui ne comprend pas «qu’à jeun» ne veut pas dire se lever de bonne heure ; bref : faire comprendre le métier tout en réalisant des gestes techniques.

La matinée se termine vers 13h00. Retour à la maison ; bref et frugal déjeuner puis une sieste bien méritée de 13h30 à 15h00. Un café - deux sucres - un glandage devant BFM Tv et un départ à 16h00 pour un marathon jusqu’à 19h45. En gros, on reprend les patients du matin pour la session de l’après-midi.

Les bonnes nouvelles... Ou pas

Puis, de temps en temps , mon épouse revient à la maison avec un sourire. À moins que cela ne fusse une peur. À moins que cela ne génère une introspection dont elle ne préfère pas développer la substantifique moelle. À moins qu’elle ne souhaite pas m’expliquer que l’un de ses patients ait failli lui exploser la gueule, lui expliquer qu’elle n’était qu’une merde et lui le «client».

À ce moment là, ses yeux sont mouillés ; ils semblent vivre en dehors de toute réalité cohérente d’un personnel de santé ; ils ne comprennent pas. Elle qui ne facture pas tous ses patients ; elle qui s'émerveille du cadeau - un gâteau, un magret de canard, un couscous marocain, une regard, un simple café... - 

Le Corona Virus ; qu’en pense une infirmière libérale ?

Nos longues discussions, depuis le confinement, sont claires. Tout comme elle l’est dans les explications de son métier. Elle s’en tape des manques de masques, de gants, de chasubles... Bref ; de protections. Elle n’est pas là pour faire de la pseudo-psychologie sur les mesures du gouvernement puisque son point central, ce sont ses patients. Elle ne se prend pas pour une héroïne ; elle est ce qu’elle a décidé d’être ; une soignante confirmée et impliquée.

Elle est bien loin de tous les pseudos manquements de masques, de gants, de casques. Si vous ne comprenez pas pourquoi ; c’est que vous ne savez pas ce qu’est une véritable soignante, à l’écoute de ses patients et ne pensant qu’à eux. Vous, qui jogguez pour votre propre plaisir ; vous, qui pestez contre des mesures que vous ne comprenez pas ; moi, conjoint d’une infirmière libérale, je vous le dis ; RESTEZ CHEZ VOUS !

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