Offensive et risque : les conditions indispensables pour la réussite d’Hollande
15 janv. 2014Le terme avait été testé le matin par son ami sénateur François Rebsamen ("le président va prendre ses risques"). Il a été martelé mardi soir à l'Elysée, à l'issue de la conférence de presse-événement du chef de l'Etat qui, asséchant vite les questions sur les tourments de sa vie privée, a pu dérouler une feuille de route économique et sociale allant jusqu'à la fin du quinquennat.
Pour la poursuite du chantier entamé en 2012
"On veut refonder le dialogue social, cela suppose effectivement une prise de risque", commentait un des conseillers du président.
Rejoignant le soir quelques journalistes après sa prestation de deux heures et quarante minutes face à 600 représentant de médias, M. Hollande mettait l'accent sur la netteté de son positionnement. "Les gens veulent de la lisibilité, de la clarté. C'est ça, le pacte".
"Il faut que dès le premier trimestre 2014, les entreprises et les Français se disent : +on sait où on va+", disait encore le président.
Virage ? Non, poursuite du chantier, selon celui qui a ironisé, lors de sa conférence de presse, sur les tournants dangereux, surtout en accélération. "Ce qui s'est passé depuis 18 mois, c'est une construction sociale-démocrate".
Mais manifestement, les partis semblent voir un Hollande nouveau face auquel il leur faut réinventer un discours et une place.
Ce n'est certes pas le cas à la gauche de la gauche ni à l'extrême droite qui peuvent poursuivre, voire accentuer leur pilonnage.
Les ultras, de gauche et se droite, pris à contre pied
Cette conférence de presse, c'est "le coup de barre à droite le plus violent qu'on ait vu de la part d'un gouvernement de gauche depuis Guy Mollet", s'est délecté Jean-Luc Mélenchon coprésident du parti de Gauche, opposant l'ennemi de la finance du discours du Bourget (janvier 2012)à celui qui distribue "des cadeaux au patronat". Quinquennat "adressé aux seules entreprises et au patronat", pour le NPA. Le quotidien communiste L'Humanité clamait mercredi en Une "moi, commis du patronat".
"Fuite en avant dans l'ultralibéralisme", pour la présidente du FN Marine Le Pen, qui a du avoir du mal à se faire expliquer les propositions économiques du Président, elle qui ne tient pas la route, dans toutes ses interventions, sur ce sujet complexe pour elle.
L'UMP est dans la merde... Encore
Mais du côté de l'UMP, l'heure était plutôt à l'embarras et à la dispersion.
La première réaction de Jean-François Copé avait été de reprendre ses critiques de 18 mois en mettant en cause la "crédibilité" d'un président accusé d'avoir été dispendieux, d'avoir fait l'inverse de ce qu'il annonce désormais.
"Tout ce qui permet de donner de l'oxygène, c'est plutôt mieux", a cependant relevé le député-maire de Meaux mercredi matin. Plusieurs caciques du principal parti d'opposition sont allés beaucoup plus loin: "changement de discours bienvenu", "vision lucide", a salué l'ex-Premier ministre Jean-Pierre Raffarin.
Si "cette prise de conscience" est "solide" et "sérieuse, objectivement, on ne peut qu'accompagner cette démarche", a déclaré l'ex-patron de Bercy François Baroin.
L'UMP "est dans un corner", juge le socialiste Jean-Christophe Cambadélis.
Le défi est lancé aussi au sein même du PS. Marie-Noëlle Lienemann, de l'aile gauche du Parti dirigé pendant onze ans par M. Hollande, s'est dite "déçue" par un président qui a "réaffirmé ses engagements en direction du Medef".
Embarras aussi du côté des alliés EELV, dont M. Mélenchon a appelé les élus à "rompre les rangs". Leur chef de file Emmanuelle Cosse, secrétaire nationale, attend "des actes concrets" et "déplore l’absence de dimension environnementale du discours présidentiel".
Tous devront se déterminer clairement puisque le président a annoncé l'engagement de responsabilité du gouvernement sur son pacte, dont le calendrier et la méthode devaient être précisés en Conseil des ministres.