Tunisie : nous avons enfin un nouveau premier ministre
18 déc. 2013Manou Bouzid, la correspondante tunisienne du Kiosque aux Canards, revient sur l’information prédominante du jour dans son pays ; un nouveau premier ministre vient d’être nommé.
Les Occidentaux en mode obstétrique
L’accouchement fut long et laborieux et a même nécessité une césarienne effectuée par les soins des Européens et des USA, et s’il fallut une césarienne pour le chef du gouvernement, on peut se laisser à penser que le gouvernement se fera en fécondation in vitro dans les laboratoires occidentaux, d’où le malaise.
Quoi que l’on puisse lire ici et là , on ne peut pas tomber plus bas qu’avec Ali le Large (Larayed).
Inconnu au bataillon
Mehdi Jomaa vient d’être nommé chef du gouvernement, cette nouvelle aurait dû déchainer les passions dans un sens ou dans l’autre mais contrairement à ce que l’on peut penser, elle a laissé les tunisiens plutôt perplexes.
Non pas que le choix de Mehdi Jomaa soit mauvais, car inconnu du grand public, on ne trouve pas grand-chose à dire sur lui, si ce n’est ce que tout le monde a lu dans les médias. Il se peut qu’il soit exactement l’homme qu’il nous fallait comme il se peut qu’il soit également une nuisance de plus pour le processus démocratique.
Ce qui pose problème en fait, c’est la façon dont il a été choisi.
La Tunisie pas si indépendante que ça
Depuis le 20 mars 1956 les tunisiens pensaient être indépendants, mais voilà que Nahda nous rappelle vite fait bien fait que nous sommes toujours sous la tutelle de l’occident qui a le droit de vie et de mort sur nous.
Après notre pseudo révolution fomentée dans les labos de la CIA et exécutée par les cybercollabos, chose qui est à présent reconnue de tous, voici que l’Oncle Sam se rendant compte que les islamistes ne leur étaient plus d’aucune utilité et risquaient même d’entraver leur projet, s’est senti obligé d’intervenir dans une crise intestine qui constipait la Tunisie depuis plusieurs mois, au risque de lui donner une diarrhée.
Par l’intermédiaire de la Patronne des patrons Wided Bouchamaoui, l’Oncle d’Amérique et ses Cousins d’Europe imposèrent Mehdi Jomaa.
Abassi patron de la centrale syndicale n’a eu qu’à se soumettre tandis que le quartet prenait le large.
Evidemment notre Hamma national ne pouvait cautionner une nomination parrainée par l’UTICA, tandis que Nida Tounes ne digèrera pas que ce soit l’Occident qui nous choisisse notre chef de gouvernement, ce que sincèrement en toute objectivité je comprends aisément.
Pourquoi lui ?
Pourquoi le choix de cet homme pratiquement inconnu ?
Sans vouloir paraitre conspirationniste, mais chat échaudé craint l’eau froide, il y a matière à devenir soupçonneux.
Je n’ai jamais cru à la bonté d’âme des gouvernements se portant gratuitement et spontanément au secours d’autres états en difficultés. Si celà avait eu lieu ne serait ce qu’une seule fois, celà se serait su.
Donc en fait la méfiance du peuple n’est pas littéralement destinée vers Mehdi Jomaa mais plutôt à ceux qui l’ont nommé.
Afin de bénéficier de cette confiance du peuple, le nouveau chef du gouvernement doit prendre ses distances vis à vis de la Troïka à qui il ne reste que le soutien de ceux qui ont un abondant système pileux et qui sont las de se raser, et de celles qui se servent du foulard comme cache misère, les coiffeurs ayant eux aussi subi l’inflation.
Les islamistes trop heureux de cette nomination
La tâche qui l’attend est assez ardue mais de là à s’imaginer que nos islamistes quittent le pouvoir, il ne faut pas rêver.
Le sourire enjôleur du grand gourou en annonçant le résultat du dialogue, ne laisse peser aucun soupçon sur les intentions et le pouvoir que continuerait à avoir la secte Nahda.
Jamais dans l’histoire arabo musulmane, on n’a vu des islamistes quitter volontairement le pouvoir, d’où les suspicions des tunisiens à l’égard du nouveau 1er ministre, suspicions légitimes lorsqu’on se souvient des promesses de ses deux prédécesseurs qui n’avaient au final qu’un but islamiser la Tunisie afin de pouvoir la contrôler à l’instar de leur maitre à tous Zine El Abidine Ben ali qui leur a laissé en héritage tout le matériel nécessaire pour soumettre le peuple.
Le pouvoir est enivrant, et pour ceux qui le tiennent, ils y restent scotchés comme une tique sur un chien, que même le plus puissant insecticide ne pourrait décoller.
Afin de gagner la confiance des tunisiens, il devra se référer à la feuille de route, préparer les élections en y instaurant une loi stricte sur le financement des campagnes et prouver au peuple qu’il roule pour le bien de la Tunisie et non pour Nahda, ni pour la syndicale patronale ni pour l’Occident.
On peut lui accorder le bénéfice du doute, mais par expérience rien de ce qui vient de Nahda n’a été bénéfique hormis pour Nahda.
Mais comme on dit « wait and see ».